jeudi 21 octobre 2010

Cap au Nord ! et à bientôt !

Lafko partira demain en direction de la Namibie, quasiment plein Nord.

Nous aurons donc passé plus d'un mois en Afrique du Sud, un pays qui ne peut laisser que de forts souvenirs tant il est plein de contrastes.

Tout d'abord, et particulièrement en y arrivant en voilier, on comprend vite qu'ici, on ne plaisante pas avec la nature.

Elle est la plus forte, elle est indomptée. On nous parle de vagues de 18 à 20 mètres, de vents de 80 nœuds, de 26 jours d'attente pour passer Bonne Espérance et de naufrages en série...

A terre, dans ce pays grand comme 2 fois et demi la France, on trouve presque tous les paysages, de grandes dunes de sable, de la savane et de la brousse, des forêts verdoyantes et des montagnes enneigées.

Singes et autruches, rhinocéros et éléphants, lions, guépards et léopards, antilopes et zèbres, baleines, phoques, dauphins et pingouins sont à portée de la main pour nous émerveiller.

Et bien sûr, il y a les femmes et les hommes qui font ce pays. C'est là que tout se complique et il serait bien impossible de tout résumer dans cet article.
L'histoire est pesante, les conflits anciens et présents se font durement sentir.

Ayant uniquement visité les régions côtières, notre vision est forcément incomplète. Il faut ajouter à cela, qu'hormis quelques exceptions, tous les Sud-Africains que nous avons rencontrés sont des Blancs et très souvent des hommes.

En Afrique du Sud, on parle ouvertement de couleurs de peau, d'origine ethnique et de religion. C'est nécessaire pour comprendre le pays.

Majoritaires à plus de 80%, les Noirs sont des Zoulous, des Xhosa, des Swazi, des Ndebélé, des Tswana, des Sothos, des Tsongas ou encore des Vendas. Ces distinctions sont parfois contestées du point de vue anthropologique.

Les Blancs (Afrikaners, Anglophones et autres) comptent pour 9%, les Métis pour 8% et les Asiatiques (Indiens et Chinois) pour les 3% restants. Les Afrikaners sont les premiers colons européens, fondateurs de la ville du Cap en 1652. Ils sont majoritairement d'origine hollandaise, mais aussi allemands et français et tous protestants. Les Anglophones sont les descendants des Anglais qui ont progressivement conquis le territoire à partir de la fin du XVIIIème siècle.

C'est ainsi que les 50 millions d'habitants du pays parlent une ou plusieurs des 11 langues officielles.

Le régime de l'apartheid ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Apartheid_en_Afrique_du_Sud ) et sa politique de séparation raciale instaurée de 1948 à 1991 n'ont fait qu'officialiser et renforcer une réalité déjà vieille de plus de 3 siècles.

Ce pouvoir absolu et atrocément injuste d'une population blanche de plus en plus minoritaire ne pouvait continuer. Nelson Mandela, après 47 ans de lutte dont 27 passés en prison, aura l'immense sagesse d'appeler à la réconciliation entre Blancs et Noirs pour éviter la guerre civile. Tous nos interlocuteurs sont unanimes sur ce point, Mandela est bien le sauveur du pays.

Mais les conflits sont toujours bien présents.

Entre Zoulous et Xhosas, historiquement rivaux, par exemple. C'est aujourd'hui Jacob Zuma, un Zoulou, qui préside le pays, alors que Mandela et les principaux leaders de l'ANC étaient des Xhosas. ( http://www.libertepolitique.com/la-paix-des-nations/5300-afrique-du-sud-la-revolution-zoulou- ) Ces conflits se ressentent aussi bien sûr dans les townships, ghettos créés par l'apartheid, où la guerre des gangs fait des ravages.

Entre Anglophones et Afrikaners, jamais vraiment réconciliés après les 2 guerres anglo-boers.
Des Afrikaners nous diront ainsi :
"Les anglais ont inventé les camps de concentration, ils n'ont jamais présenté d'excuses pour ce qu'ils nous ont fait." ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Seconde_Guerre_des_Boers#Les_camps_de_concentration )

"This place is very Afrikaans." diront 2 jeunes anglophones de notre âge en arrivant à un barbecue.

Première puissance économique africaine, l'Afrique du Sud est un pays très riche en matières premières et doté d'infrastructures qui n'ont rien à envier à l'Europe.

Les richesses y sont cependant très mal redistribuées et la pauvreté touche une grande partie des populations noires. Le taux de chômage atteint les 35% et l'analphabétisme, 40%.

On assiste aussi à un phénomène surprenant, l'exode des Blancs. Il y aurait aujourd'hui environ 2000 sud-africains blancs qui quitteraient le pays tous les mois, principalement des Afrikaners ( http://www.cyberpresse.ca/international/afrique/201006/23/01-4292587-exode-massif-des-sud-africains-blancs.php et
http://www.cyberpresse.ca/international/afrique/201006/23/01-4292578-les-refugies-blancs-dafrique-du-sud.php )

L'un d'entre eux, au chômage, me dira : "I've got the wrong skin color and I speak Afrikaans, I won't get a job anymore".
Nous avons aussi rencontré dans l'Océan Indien plusieurs couples sud-africains ayant quitté le pays pour vivre leur retraite sur leur bateau.
Il semblerait que la sécurité soit la première raison de cet exode. On compte en effet plus de 50 meurtres par jour et chaque groupe vit dans des camps retranchés entourés de barbelés et gardés par des vigiles.

A Richard's Bay, dans le Zululand, nous avons pu ressentir la pression qui pèse sur ces populations blanches. Nous avions le sentiment, partagé avec d'autres navigateurs étrangers, que les Afrikaners vivaient en sursis.
A Cape Town, la vie semble différente, plus apaisée, bien que chaque personne rencontrée nous ait dit s'être fait voler un auto-radio, un sac à mains ou cambrioler.
Johannesburg, que nous n'avons pas visitée, est bien pire puisque des rues entières sont transformées en bunkers...

Malgré ce tableau bien triste, l'Afrique du Sud est un pays qui attire. Chacun d'entre nous a au moins une fois imaginé s'y installer. Cape Town, en particulier, nous a semblé être un bout d'Europe où l'aventure est encore possible ! La forte communauté française qui y vit ne s'est certainement pas trompée. A suivre donc...

C'est très certainement en grande partie l'hospitalité des Sud-africains rencontrés qui nous a donné cette envie.

Nous sommes dans un pays de marins et c'est une première pour Lafko. C'est un plaisir de trouver des personnes qui savent ce qu'est un voilier et qui comprennent ce dont nous avons besoin. Nous avons pu effectuer ici beaucoup de travaux sur Lafko qui s'est rarement porté aussi bien ! A chaque escale, nous avons été très bien accueillis ( et désaltérés...) par des gens serviables et amicaux qui nous ont énormément aidés et fait visiter leur pays.

Alors merci ! Merci, merci et encore merci à tous les Sud-Africains rencontrés de Richard's Bay à Cape Town en passant par East London et Mossel Bay ! et à bientôt !

6 commentaires:

Laure a dit…

Ya pas à dire, ca commencait à me manquer sérieusement tes articles, Monsieur l'historien!! Tu parviens en quelques lignes à nous plonger au coeur de la complexité de ce beau pays...merci Flo!

Alph a dit…

Par contre, j'ai pas été voir tous les liens, sinon je bosse plus de l'après-midi.......

Unknown a dit…

Cet article produit ce qu'on appelle le "waouh effect" !!! Merci et bonne nav' vers le nord puis l'ouest. Je penserai bien à vous. Soyez prudents, éclatez-vous, vivez des sensations inoubliables... Bizzz, AnneSo

Arnaudesau a dit…

Merci pour cet exposé Florent !
Bonne remontée vers le Nord...
Arnaud

Jean-Gabriel a dit…

Vraiment intéressant, mais hélas on voit bien qu'il y a des problèmes pas simples à régler...

Marie S a dit…

Du pur bonheur pour Florent qui a du passer des heures et des heures à s'imprégner de l'ambiance du pays. Merci.

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